Revue de Primatologie (Jan 2014)

Disponibilité spatiale et temporelle des espèces alimentaires des chimpanzés et variations de densité inter-communautés dans le Parc national de Kibale (Ouganda)

  • Sarah Bortolamiol,
  • Marianne Cohen,
  • Protase Rwaburindore,
  • John Kasenene,
  • Andrew Seguya,
  • Flora Pennec,
  • Quentin Vignaud,
  • Sabrina Krief

DOI
https://doi.org/10.4000/primatologie.1350
Journal volume & issue
Vol. 5

Abstract

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Les grands singes font face au récent déclin des conditions environnementales favorables à leur distribution. Parmi eux, notre plus proche parent, le chimpanzé est menacé (classé « en danger » sur la liste rouge de l’IUCN). La densité des chimpanzés (Pan troglodytes schweinfurthii) dans le parc national de Kibale dans l’Ouest de l’Ouganda diffère selon les communautés (1,5 à 5,1 chimpanzés/km2 respectivement à Kanyawara et Ngogo) qui sont pourtant géographiquement proches les unes des autres (N=3 communautés distantes de 9 à 17 km). Les activités anthropiques à l’intérieur de l’aire protégée (exploitation commerciale du bois dans les années 1970, route à fort trafic, essences exotiques, braconnage) et à l’extérieur de ses limites (jardins vivriers, cultures de thé) peuvent avoir un impact sur la quantité et la distribution des ressources alimentaires des chimpanzés et indirectement sur leur répartition spatiale dans le parc. Des variations des choix alimentaires des chimpanzés, en relation avec la disponibilité spatiale et temporelle de ces ressources a récemment été mises en évidence entre Kanyawara et Ngogo. Notre étude a été menée à Sebitoli (extrémité nord du parc) où la pression anthropique passée et présente est très forte. Après 4 ans d’habituation, la densité est estimée à 4,4 chimpanzés/km² sur un domaine vital de 22 km². Afin de comprendre les facteurs expliquant cette forte densité, nous avons évalué la disponibilité spatiale des ressources alimentaires par un recensement de la végétation herbacée et ligneuse dans 63 parcelles totalisant 22 hectares. La disponibilité temporelle des ressources alimentaires a été évaluée par l’analyse de 18 mois d’observations phénologiques (456 arbres sur 5 km de transects). La zone d’étude de Sebitoli ayant été particulièrement touchée par l’exploitation commerciale du bois, 36 % de la forêt sont actuellement en cours de régénération. La surface terrière des arbres fruitiers alimentaires consommés par les chimpanzés est moins importante à Kanyawara et Sebitoli qu’à Ngogo (zone du parc non exploitée commercialement par le passé). Cette étude montre que les surfaces terrières des espèces du genre Ficus, particulièrement appréciées par les chimpanzés, sont généralement plus importantes à Sebitoli qu’à Kanyawara et Ngogo. Bien que les variations temporelles de la fructification des espèces alimentaires de la communauté de chimpanzés de Sebitoli diffèrent des deux autres sites d’étude (rôle des activités anthropiques passées et présentes), elles sont sensiblement plus similaires de celles de Kanyawara que de Ngogo. Les interactions spatiales entre les éléments anthropiques et les animaux sauvages, le maintien d’espaces de surface suffisante pour assurer les migrations entre les communautés ainsi que d’autres variables environnementales sont des facteurs non mis en évidence ici qui ont rôle dans la conservation et la distribution des chimpanzés.

Keywords