Tempo e Argumento (Jun 2013)

Quand Clio joue les Pandores : les archives entre histoires et mémoires <em>DOI: 10.5965/2175180305092013188</em>

  • Sylvie Sagnes

Journal volume & issue
Vol. 5, no. 9
pp. 188 – 202

Abstract

Read online

Histoire et mémoire ne sont pas deux notions exactement superposables et le sont d’autant moins dès lors que le passé dont elles rendent compte porte la marque d’un traumatisme de l’histoire. Au cœur des relations heurtées qu’entretiennent alors Clio et Mnémosyne, se tient l’archive. Dans pareil cas, le traitement dont celle-ci fait l’objet constitue sans conteste un observatoire privilégié des innombrables enjeux que soulève la remémoration du passé. Si d’aucuns en doutent, les travaux et essais français dont cet article propose la synthèse l’illustrent éloquemment. Ils montrent, en contrepoint des convoitises que l’archive suscite, le pouvoir que nos représentations occidentales imputent à leur possession. Cible d’une violence d’un autre genre, l’archive malmenée nourrit les polémiques à la faveur desquelles varient les alliances et se meuvent les lignes de rupture. Sur l’échiquier de la mémoire, militants, historiens professionnels, politiques, législateurs et juges jouent un jeu compliqué auquel, à compter des années 1980, prennent part les témoins ainsi que les historiens issus des rangs des communautés mémorielles. A l’épreuve de la preuve, les mémoires s’entrechoquent. Mémoires dominées et dominantes, victimaires et héroïques, subjectives et objectives, mémoires du cœur et de la raison s’opposent dans un fracas dont les secousses affectent immanquablement la discipline historique.