Cahiers Africains des Droits de l’Homme et de la Démocratie ainsi que du Développement Durable (Oct 2022)
L’ACCAPAREMENT DES COMPÉTENCES DES JURIDICTIONS ORDINAIRES PAR DES JURIDICTIONS MILITAIRES CONGOLAISES ET L’AFFIRMATION DE LEUR COMPÉTENCE PERSONNELLE : CAS DE L’AFFAIRE KAMUINA NSAPU AU KASAÏ
Abstract
En droit interne congolais, spécialement droit pénal militaire le traitement des personnes étrangères à l’armée interpelle et inquiète. L’interpellation se rapporte particulièrement à la situation des civils condamnés par les juridictions militaires dans le procès Kamuina Nsapu devant le tribunal militaire de Garnison de Kinshasa Gombe, accusés de mouvement insurrectionnel à Kinshasa et dans le Grand Kasaï. Et l’inquiétude est suscitée notamment par rapport au choix opéré sur la juridiction compétente militaire à la place des juridictions ordinaires conformément aux prévisions légales. L’étude a d’abord utilisé la méthode exégétique, en recherchant le vrai sens à donner aux dispositions normatives en rapport avec la question sous examen. L’objet majeur est celui de rendre justice, afin que le coupable subisse la sanction prévue par le texte pour son agissement, que les victimes soient rétablies, tant soi peu, dans leur droit, et que l’ordre public troublé par le comportement décrié soit rétabli au sein de la société toute entière. Or, le militaire vis-à-vis de la nation n’est pas soumis aux mêmes obligations que le commun des citoyens. Les dures exigences de son métier imposent qu’il soit régi par des règles particulières. Le fondement du droit pénal militaire et de la justice militaire réside dans la nécessité du maintien d’une façon permanente et sans relâche d’une discipline particulière aux Forces Armées et de la mise en œuvre des moyens propres à assurer la sécurité de l’Etat et de l’unité de la nation. Et donc confondre le militaire soumis à la discipline et le civil non soumis à une quelconque discipline à un même régime répressif serait alors une injustice institutionnelle.