Recherches Germaniques (Dec 2010)
Weimar, anno 1797 : le moment anthropologique dans la genèse de Faust
Abstract
Lorsqu’en 1797 Goethe reprend le manuscrit de Faust sur l’insistance de Schiller, il se trouve confronté avec une œuvre de jeunesse qu’il considère à présent comme un produit barbare et qui lui inspire un mélange d’attirance et de répulsion. C’est précisément cette ambivalence qui deviendra le moteur de son écriture poétique en l’amenant à redéfinir l’enjeu du drame faustien. Il élève alors le personnage de légende au rang de représentant de l’humanité, audace créatrice qui élargissait la perspective de l’œuvre jusqu’à l’incommensurable. Cette adéquation entre le personnage de Faust et l’humanité trouve son expression dramatique dans le Prologue au ciel, théâtre du monde au sens baroque qui succède de manière symétrique au monde du théâtre, représenté dans le volet précédent. Toutefois, le caractère essentiellement ludique de ce métatexte théâtral où se mêlent le discours solennel des archanges, les propos sereins du Seigneur et les railleries de Méphisto, interdit de voir là un carcan théologico-philosophique fixant le devenir de l’œuvre dans une perspective purement optimiste. C’est en ce sens que le moment anthropologique dans la rédaction de Faust exprime un fragile projet de l’humain.