Akofena (Feb 2024)

Aspects linguistiques d’un conflit territorial et ethnique entre deux ksours à Goulmima au Sud-est du Maroc

  • Mustapha KHIRI

DOI
https://doi.org/10.48734/akofena.n011v1.06.2024
Journal volume & issue
Vol. 01, no. 11

Abstract

Read online

Résumé : L’article propose l’étude de la répercussion d’un conflit autour de la propriété des terres collectives entre deux ksours[1] limitrophes qui sont le ksar des Ait Yahya Outmane et le ksar Magamane sur le comportement sociolinguistique des locuteurs du premier ksar à savoir le ksar des Ait Yahya Outmane. Les rapports entre les deux ksours étaient paisibles. Certes, ils ne sont pas de la même ethnie. Mais ils sont unis par des liens du mariage et de parenté. Les deux ksours partagent presque la même histoire sociale. Au niveau linguistique, les Ait Yahya Outmane abandonnent progressivement les traits stigmatisés de leur parler en (n) et s’alignent sur le parler en (l) des Ait Magamane jugé sociolinguistiquement plus privilégié. Depuis 2016 en particulier, le gouvernement a pris la décision de permettre aux ayants droit de devenir propriétaires de leurs terres collectives pour une meilleure exploitation des terres agricoles rurales. Les deux ksours revendiquent violemment les mêmes terres. La haine entre les deux voisins s’installa à tel point que le toponyme Magamane est griffonné sur les panneaux de signalisation routière de direction installés à Ait Yahya Outmane, et vice versa. Durant l’enquête que nous avons réalisée, nous avons remarqué que les Ait Yahya Outmane réassument les particularités linguistiques de leur parler en (n) en vue d’afficher leurs différences ethniques et linguistiques par rapport aux Ait Magamane qu’ils considèrent comme étant des étrangers qui se sont installés près d’eux et sur leurs terres pendant une période historique bien particulière. Mots-clés : Conflit linguistique, terres collectives, parler stigmatisé, parler privilégié ______________ [1] Pluriel du Ksar. Le Ksar désigne jadis une fortification habitée dans les zones présahariennes et sahariennes au Maghreb. Ce mot désigne actuellement une unité d’habitation humaine sédentaire unie par des liens sociaux et ethniques. Chaque ksar dispose de ses dépendances : palmeraie, puits, aire, cimetière, une organisation administrative et sociale.