Cadernos de Linguística (Jul 2020)

Aux limites du discours

  • Jean-Jacques Courtine

DOI
https://doi.org/10.25189/2675-4916.2020.v1.n1.id275
Journal volume & issue
Vol. 1, no. 1

Abstract

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Paris, dernier quart du XIXème siècle… Avec l’urbanisation accélérée de la capitale, l’augmentation massive de sa population, des anxiétés nouvelles se font jour. L’alcoolisme fait rage, les dégénérescences guettent. « N’y-a-t-il pas plus de fous aujourd’hui qu’autrefois ? », s’inquiète ainsi le Dr Paul Garnier dans sa Folie à Paris (1890). Il occupe une position stratégique pour répondre à la question : Garnier est le médecin-chef de l’Infirmerie Spéciale du dépôt de la Préfecture de Police, où sont transportés tous les insensés qu’on embarque sur les pavés de la capitale. Et la réponse est affirmative : l’entassement dans la cité de masses compactes et flottantes d’individus anonymes ferait éclore de nouvelles folies urbaines, jusqu’alors inconnues. La ville produirait donc de la folie, dont la psychiatrie observe, transcrit, identifie, et classe les discours. On pourrait en rester là, et n’y voir rien d’autre qu’un épisode classique de la longue histoire du contrôle des aliénés. Mais il y a une autre manière de lire ce tableau des misères urbaines dont les rapports psychiatriques consignent scrupuleusement les discours ; et d’y entendre les voix de ces égarés lorsqu’elles percent la surface du discours psychiatrique.

Keywords