Revue Internationale des Francophonies (Dec 2019)

Une nouvelle F(f)rancophonie pour l’Afrique de l’Est. Effets didactiques de la politique linguistique française en Tanzanie

  • Anaïs Delabie

DOI
https://doi.org/10.35562/rif.975
Journal volume & issue
no. 6

Abstract

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Cet article propose de revenir sur les évolutions de la politique extérieure française et leurs conséquences sur la diplomatie culturelle et la Francophonie. La « langue étrangère » est, avant tout, le résultat d’une politique, d’un processus diplomatique. Ce pan définitionnel, trop souvent omis par les didacticiens, est pourtant sous-jacent aux travaux de Valérie Spaëth ou encore Monica Heller lorsqu’elles mettent en évidence les liens entre politiques linguistiques, idéologies et construction ontologique de la langue en tant qu’objet. Ces liens ne datent pas de la colonisation. Ils apparaissent en France dès le XVIe siècle, à l’éclosion de la diplomatie culturelle. Nous retraçons donc cet itinéraire des rapports entre politique extérieure, diplomatie et didactique des langues. Nous décrivons également l’état actuel de la diplomatie culturelle et ce que cela induit pour la Francophonie et son aménagement. Nous présentons ensuite le tournant diplomatique majeur qu’a pris, selon nous, la diplomatie française et, avec elle, la Francophonie en revenant sur l’histoire de ce couple politique et intellectuel. Après un bref retour historique retraçant la façon dont la France a orienté depuis le XVIe siècle son discours à l’égard de sa politique extérieure, nous nous arrêtons plus longuement sur la manière dont, ces dernières années, la diplomatie économique a pris de plus en plus de place au sein du Ministère des Affaires étrangères. La diplomatie culturelle, dans laquelle se trouve intégré l’enseignement-apprentissage du français, a été impactée par une orientation économique inspirée notamment par le contexte international et l’influence chinoise sur le plan diplomatique. Notre travail est centré sur la F(f)rancophonie en Afrique de l’Est, plus précisément la Tanzanie. Nous illustrons donc le rapport intérieur/extérieur en présentant la posture de la France à l’égard de la région, la façon dont les institutions satellites de la Francophonie la relaient sur le terrain par la biais d’un sas diplomatique. La France et la Tanzanie partagent des intérêts économiques et diplomatiques que la Francophonie scelle un peu plus. Ce rapprochement est scruté par le Burundi et le Rwanda, pays francophones et membres de la Communauté Est africaine, qui jouent tous deux un rôle décisionnel incontournable. Enfin, nous nous interrogeons quant à notre rôle dans ce processus spécifique de politique linguistique extérieure : comment, en tant qu’universitaires, devons-nous nous positionner face à ces idéologies mises au service du politique dans le but de modifier les programmes d’enseignement ?