Dictynna (Dec 2023)
Signaler la variation, annoncer l’innovation : deux marqueurs intertextuels d’Ovide dans la réécriture du rapt de Proserpine (Mét. V, 294-571)
Abstract
Dans le chant V des Métamorphoses, la Muse Calliope remporte le concours de chant qui l’oppose à l’une des Piérides en racontant la quête de Cérès après le rapt de Proserpine. L’originalité de son récit repose notamment sur le choix des personnages qui aident la déesse à retrouver sa fille, les nymphes siciliennes Cyané et Aréthuse. En effet, Aréthuse n’est associée à l’histoire de Proserpine dans aucune source antérieure aux Métamorphoses et l’existence littéraire même de la nymphe Cyané est plus qu’incertaine avant Ovide. Cet article mettra en valeur deux procédés employés par Ovide pour signaler cette innovation. D’une part, le poète souligne sa prise de distance avec une tradition remontant à l’Hymne homérique à Déméter par l’emploi le verbe de mouvement demouere, qui, dans un sens métapoétique, peut signifier « détourner », « rejeter » (une tradition) – tout comme παραμείβειν chez Apollonios de Rhodes et praeteruehi chez Virgile indiquent un écart par rapport à leurs modèles. D’autre part, Cyané est présentée comme celeberrima (« très célèbre ») alors qu’elle ne l’est pas pour son lecteur. Le poète, par cette affirmation, insère faussement son personnage dans la tradition et confère à son histoire une autorité. Ces deux procédés ne sont pas propres à Ovide, mais il en systématise l’emploi, ce qui en fait des marqueurs de variation repérables pour un lecteur averti.
Keywords