Balcanica (Jan 2018)

De la Grèce rêvée à la Grèce vécue Ll’armée d’Orient dans une interculturalité complexe

  • Krempp Puppinck Thérèse

DOI
https://doi.org/10.2298/BALC1849091K
Journal volume & issue
Vol. 2018, no. 49
pp. 91 – 106

Abstract

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Après l’échec subi aux Dardanelles, les Alliés décidèrent d’envoyer des troupes en Grèce et les premiers contingents de l’armée d’Orient débarquèrent à Salonique au mois d’octobre 1915. L’armée d’Orient se déploya à travers la Macédoine grecque jusqu’en janvier 1921. Cette région abritait des populations variées: Turcs, Bulgares, Serbes, Albanais, Tziganes, Koutso-Valaques, Juifs sépharades, Grecs, chacun s’exprimant dans sa propre langue. Ainsi l’armée française d’Orient s’imposa sur un territoire au peuplement très divers, qui de surcroît venait de quitter l’empire ottoman pour être rattaché à la Grèce. Ce caractère multiculturel rendit le contact entre l’armée d’Orient et le pays particulièrement complexe. En arrivant dans la rade de Salonique, les soldats avaient inévitablement mobilisé leurs référents culturels ainsi que tout un imaginaire nourri de stéréotypes. Rattachaientils la Grèce à son passé antique prestigieux, ou se tournaientils plutôt vers un orientalisme considéré comme plus attirant car plus fantasmagorique? Les clichés véhiculés dans l’esprit des soldats français par la culture classique des humanités et par le courant orientaliste ontils pu résister au choc d’une interculturalité polysémique ? L’analyse de la Revue franco-macédonienne, écrite par les soldats de l’armée d’Orient, et l’étude de souvenirs publiés ou inédits, laissent largement apparaître la profonde déception des soldats français, qui ne comprirent pas la configuration culturelle du territoire macédonien, et qui restèrent prisonniers d’impressions subjectives et de réactions émotionnelles. La Grèce rêvée avant le départ ne résista pas à la confrontation avec la réalité, qui fut alors rejetée de façon virulente par de nombreux soldats.

Keywords