Revue de Primatologie (Jan 2016)
Utilisation et résistance d’un nouveau jouet introduit chez des macaques cynomolgus hébergés en milieu standard ou appauvri
Abstract
Les centres fournisseurs et utilisateurs de primates non-humains (PNH) à des fins scientifiques hébergent les animaux dans des conditions adaptées à leur statut sanitaire et leur rôle ponctuel (reproduction, élevage, stabulation, en étude) tout en prenant en compte les contraintes liées à la compatibilité des individus et des locaux disponibles. Que les animaux soient hébergés en milieu « standard » (en groupe social d’une dizaine d’individus dans une volière avec accès extérieur) ou en milieu « appauvri » (en paire en enclos sans accès extérieur) pour raison sanitaire ou vétérinaire, un programme d’enrichissement adapté est mis en place pour améliorer le bien-être des animaux en captivité. L’un des enrichissements non alimentaires le plus utilisé chez le PNH est le « jouet ». Celui-ci se doit d’être manipulable, non toxique, résistant sans oublier qu’il doit être adapté aux contraintes que représentent les différentes conditions d’hébergement. Par-dessus tout, un objet ne peut être considéré comme enrichissement tant que son efficacité en termes d’induction de comportements d’intérêt et d’interaction exprimés par l’animal envers celui-ci n’a pas été prouvée. Le fournisseur de matériel biomédical PLEXX vient de mettre sur le marché une nouvelle gamme de jouets (Zogoflex) « extrêmement résistants et flexibles » dont l’efficacité et la réelle résistance à long terme n’ont pas encore été testées chez les PNH. En collaboration avec Silabe, centre fournisseur et utilisateur de PNH, l’un des jouets de la gamme a été testé. Le jouet « Bumi » était introduit dans quatre conditions différentes chez des macaques cynomolgus : un groupe de jeunes femelles hébergées en milieu standard, un groupe de mâles adultes hébergés en milieu standard, une paire de jeunes femelles hébergées en milieu appauvri et une paire de mâles adultes hébergés en milieu appauvri. Les comportements d’interaction exprimés par les animaux envers le nouveau jouet ont été filmés puis relevés à l’aide du logiciel The Observer (Noldus, Pays-Bas) via la méthode de focal sampling lors de quatre périodes d’observations continues de deux heures réparties sur les 48 heures suivant l’introduction du jouet (deux heures le matin et deux heures l’après-midi, pendant deux jours). Les résultats ont montré que les deux groupes d’animaux hébergés en milieu standard interagissent avec le jouet pendant 92,9 % du temps pour les jeunes femelles et 80,4 % pour les mâles adultes, avec une utilisation majoritaire en hauteur par rapport au sol. En revanche, les paires hébergées en milieu appauvri, bien qu’ayant moins d’autres stimuli, n’ont passé que 0,3 % du temps à interagir avec le jouet pour les jeunes femelles et 6,3 % pour les mâles adultes. Il semblerait que ce genre d’enrichissement non alimentaire présente moins d’intérêt pour les animaux hébergés en milieu appauvri que pour ceux hébergés en milieu standard, quels que soient l’âge et le sexe, peut-être à cause de l’effet de compétition pour la ressource qui est plus importante dans un groupe de dix d’animaux que dans une paire. Les animaux hébergés en paire en enclos sans accès à l’extérieur, plus préoccupés par ce qui se passe en dehors de leur enclos, prêteraient moins d’attention aux nouveautés introduites dans leur espace de vie que les animaux hébergés en groupe social dans une volière avec accès extérieur qui se soucieraient davantage de ce qui se passe à l’intérieur de leur volière. Concernant la résistance, l’un des jouets a été fortement abimé en seulement deux semaines à cause de morsures chez le groupe de mâles adultes. Toutefois, la résistance et la flexibilité qu'offre cette nouvelle gamme de jouets sont très satisfaisantes pour une utilisation chez des PNH, hormis pour les animaux à grandes canines.
Keywords