Revue Internationale de Politique de Développement (Oct 2018)

L’urbanisation et les géographies politiques de la lutte violente pour le pouvoir et le contrôle : les boomtowns de la région Est du Congo.

  • Karen Büscher

DOI
https://doi.org/10.4000/poldev.3346
Journal volume & issue
Vol. 10

Abstract

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Cet article traite des transformations rurales-urbaines dans les provinces du Kivu, en République démocratique du Congo (RDC), et se concentre plus particulièrement sur la relation complexe entre les dynamiques de conflit violent et l’émergence des boomtowns (villes-champignons) minières urbaines. Les villes minières constituent des lieux fascinants pour enquêter sur les conséquences socio-économiques et spatiales d’une très longue histoire de violence, de déplacement et de militarisation. Elles sont le produit spatial des dynamiques engendrées par la puissance transformatrice des conflits violents. En outre, ce chapitre montre dans quelle mesure elles offrent un point de départ analytique et spatial intéressant à partir duquel étudier les géographies politiques des dynamiques de guerre dans l’Est de la République démocratique du Congo. Nous avancerons l’idée que ces villes minières se transforment en « ressources » stratégiques dans les luttes violentes pour l’obtention du pouvoir et du contrôle tant en raison de leur nature urbaine que par la présence de ressources naturelles. De ce fait, ce chapitre analyse les processus d’urbanisation minière dans les provinces du Kivu comme une composante des politiques spatiales menées par les élites (armées) pour le pouvoir et le contrôle. En tant que centres économiques à forte concentration démographique, les villes minières représentent des ressources politiques, économiques et sociales pour les « hommes forts » (Big Men), les groupes armés et l’État congolais dans leurs luttes politiques à plus large échelle pour le pouvoir, la légitimité et l’autorité. Dans un contexte de gouvernance fragmentée à échelles multiples, la dynamique d’urbanisation de ces villes est le produit d’une interaction et d’une opposition complexes entre différentes formes d’agentivité. En prenant appui sur trois cas ethnographiques de villes minières qui émergèrent de diverses dynamiques d’activités minières artisanales et de déplacement forcé, ce chapitre contribue aux débats universitaires et politiques plus larges sur la nature politique de l’urbanisation minière dans un contexte de conflit et de gouvernance fragmentée.