Tr@jectoires (Nov 2008)

La bouche au XVIIe siècle

  • Bruno Faux

Journal volume & issue
Vol. 2

Abstract

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« Qu’y a-t-il outre l’intelligence de plus prodigieux que la bouche de l’homme ? » (G. P. Harsdörffer). Parce que la bouche est non seulement le siège de l’oralité, mais aussi celui du goût, ainsi qu’un lieu d’expression des affects, elle s’illustre dans la littérature allemande du XVIIe siècle comme un topos dense, capable de générer diverses sortes de récits, autour duquel s’articule un vaste réseau de sens. Voie de passage entre le dedans et le dehors du corps, elle est l’organe frontière proprement dit. D’un point de vue physiologique et rhétorique, elle représente un espace stratégique : la frontière anatomique qu’est la bouche, qui est aussi une frontière symbolique, devient dans l’œuvre de Georg Philipp Harsdörffer ou de Friedrich von Logau le théâtre de conflits éthiques, de la dialectique de l’être et du paraître, de la sincérité et de la fausseté. Une problématique anthropologique fondamentale de la première modernité se reflète dans la métaphore de la frontière, du seuil, du passage, et trouve son expression dans l’opulence des images de la bouche présentes dans la littérature de cette époque. C’est précisément dans la langue poétique, dans la vive picturalité du langage, que les auteurs de l’âge baroque parviennent à établir une forme de savoir qui leur est propre.

Keywords