L’invisibilisation des femmes dans la littérature russe du XIXe siècle : le cas de Maria Joukova
Abstract
Maria Joukova (1805-1855) a joui de son vivant d’un réel succès et son œuvre a fait l’objet de recensions dans les revues les plus importantes de la première moitié du XIXe siècle, qui l’ont également publiée. Après sa mort, elle a cependant été reléguée dans cette zone grise que Nikolaï Nekrassov qualifiait de « littérature de second rang » et par la suite exclue du canon, ainsi que la totalité des femmes qui avaient pris la plume entre 1759, date de la première œuvre féminine publiée en Russie, et les années 1890, lorsque les poétesses symbolistes s’imposent dans le champ littéraire russe. À partir du cas paradigmatique de Maria Joukova, nous examinerons les mécanismes et les effets de l’invisibilisation des autrices russes du XIXe siècle, dans le contexte d’une littérature marquée par une stricte hiérarchisation des valeurs et des œuvres ainsi que par des réflexes patriarcaux et essentialistes qui confèrent toute autorité au texte masculin. C’est en s’adaptant aux codes de cette littérature et en les subvertissant de l’intérieur que Joukova a pu donner une voix aux femmes et offrir à la littérature russe de nouveaux espaces narratifs.
Keywords