INRAE Productions Animales (May 2023)

La qualité des aliments d’origine animale : enseignements d’une expertise scientifique collective

  • Sophie PRACHE,
  • Camille ADAMIEC,
  • Thierry ASTRUC,
  • Elisabeth BAÉZA,
  • Pierre-Etienne BOUILLOT,
  • Antoine CLINQUART,
  • Cyril FEIDT†,
  • Estelle FOURAT,
  • Joël GAUTRON,
  • Agnès GIRARD,
  • Laurent GUILLIER,
  • Emmanuelle KESSE-GUYOT,
  • Bénédicte LEBRET,
  • Florence LEFÉVRE,
  • Sophie LE PERCHEC,
  • Bruno MARTIN,
  • Pierre-Sylvain MIRADE,
  • Fabrice PIERRE,
  • Mégane RAULET,
  • Didier RÉMOND,
  • Pierre SANS,
  • Isabelle SOUCHON,
  • Catherine DONNARS,
  • Véronique SANTÉ-LHOUTELLIER

DOI
https://doi.org/10.20870/productions-animales.2023.36.1.7480

Abstract

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Cette synthèse dresse un bilan critique de l'état des connaissances sur la qualité des aliments d'origine animale selon les conditions de production de l’animal et de transformation des produits, y compris les attentes et comportements des consommateurs et les effets de la consommation des aliments sur la santé humaine. La qualité a été déclinée selon sept dimensions : sanitaire, commerciale, organoleptique, nutritionnelle, technologique, d’usage et d’image. Cette dernière recouvre les dimensions éthiques, culturelles et environnementales associées à l'origine de l'aliment et à la manière dont il a été élaboré. Ce cadre permet de mettre en évidence les priorités accordées à ces différentes dimensions et d'identifier les antagonismes et synergies potentiels entre elles. Nous faisons un constat de priorité accordée aux dimensions commerciales de la qualité, notamment pour les produits standards. Cette priorité a fortement orienté la sélection génétique des animaux et les pratiques d’élevage dans toutes les filières. Elle a permis des gains quantitatifs considérables, mais souvent au détriment d'autres dimensions de la qualité. Des exemples emblématiques sont le poulet de chair standard, pour lequel la sélection sur la vitesse de croissance et le rendement en filet ont eu des conséquences délétères sur les propriétés organoleptiques, nutritionnelles et d'image, et le devenir des mâles dans la filière poules pondeuses ; et certaines filières laitières, qui ont fortement spécialisé leurs animaux. La qualité peut se construire mais aussi s’altérer tout au long de la chaîne alimentaire. Nous soulignons les facteurs et les périodes critiques, comme les pratiques d’élevage, notamment l'alimentation des animaux, les phases de pré-abattage et d'abattage, les pratiques de transformation et de formulation des aliments. Nous pointons certains facteurs qui créent des antagonismes entre différentes dimensions de la qualité, comme la castration des porcs mâles, la substitution des aliments d'origine marine par des aliments d'origine végétale chez les poissons, et l'utilisation des nitrites dans la transformation de la viande. Les recherches s’orientent vers les possibles compromis entre ces effets positifs et négatifs et/ou vers des solutions pour dépasser ces antagonismes. Il y a aussi des aliments qui valorisent des synergies entre différentes dimensions de la qualité et entre les phases de production et de transformation, notamment les indications géographiques. Les études d’épidémiologie nutritionnelle montrent des associations entre la consommation d'aliments d'origine animale et l'augmentation ou la diminution du risque de maladies chroniques ; elles ont permis de formuler des recommandations en matière de santé publique. Cependant, elles ne prennent pas encore en compte les conditions de production et de transformation, et nous pointons le besoin d’une meilleure connexion entre les communautés scientifiques à l’échelle de l’élevage, de la transformation, de la nutrition humaine et de l'épidémiologie pour combler cette lacune. Les besoins de recherche et les pistes d'action publique sont discutés.