Mise au Point (Apr 2016)

Débats animés sur l’animationLa querelle Donald Crafton / Alan Cholodenko

  • Jean-Baptiste Massuet

DOI
https://doi.org/10.4000/map.2105
Journal volume & issue
Vol. 8

Abstract

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La revue Animation : An Interdisciplinary Journal a proposé, en 2011, une réflexion sur l’animation dans le cinéma des premiers temps, prenant le parti d’adopter une approche consistant à repenser l’histoire du cinéma sous l’angle de la « série culturelle » de l’animation. La première question qui surgit de cette démarche est en l’occurrence la première dont traite ce numéro, question sans fin, constamment posée, mais qui trouve ici une nouvelle résonnance : qu’est-ce, au final, que l’animation ? Est-ce un domaine cinématographique singulier, institutionnalisé dans les années 1950 et s’accaparant rétroactivement tous les films de ses pionniers encore inconscients des implications futures de leurs œuvres ? Ou bien est-ce une technique généralisée de mise en mouvement des images?De fait, l’ouvrage commence par une querelle. Elle oppose, depuis le milieu des années 1990, Donald Crafton, auteur de l’article inaugural du volume, et Alan Cholodenko, théoricien de l’animation auteur, entre autres, de la double anthologie The Illusion of Life, et surtout de l’article « The Animation of Cinema » publié dans The Semiotic Review of Books (vol. 18.2, 2008), réponse directe à l’introduction du classique de Crafton : Before Mickey – The Animated Film, 1898-1928. Cholodenko est défenseur de l’idée consistant à affirmer que tout le cinéma est de l’animation, tandis que Crafton y voit un amalgame sémantique finalement peu convaincant, car largement décontextualisé. Le jeu sur les mots et les concepts, témoin d’une approche de théoricien du cinéma, est donc remis en question par Crafton, préférant à la démarche théorique une démarche de type historiographique. Nous souhaiterions revenir sur cette querelle, non seulement pour comprendre l’impasse à laquelle elle semble inévitablement mener, mais également – ce serait notre objectif – pour chercher à inventer des moyens de l’en dégager. Nous proposerons ainsi de prendre ce débat dans une perspective épistémologique afin de mettre en relief, non plus l’apport de l’un ou l’autre de ces deux chercheurs à la question de l’animation, mais plutôt l’apport de cette double-approche antagoniste à la compréhension de la pluralité théorique constitutive de la notion. Il s’agira ainsi de comprendre que si l’histoire des théories de l’animation se trouve compliquée par la diversité des méthodes choisies pour la conceptualiser et par les débats qui l’animent, cette diversité est également à la source de sa singularité et de son « identité » théorique qu’il conviendrait, le temps de cette réflexion, de mettre à jour dans une perspective nouvelle.