Lien Social et Politiques (Jan 2021)

Théoriser un sentiment de minorisation : les francophonies canadiennes entre philosophie politique et psychologie sociale

  • Jérôme Melançon,
  • Sean E. Moore

DOI
https://doi.org/10.7202/1079500ar
Journal volume & issue
no. 86

Abstract

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Le but de cet article est de fournir une première théorie quant à l’existence d’un sentiment de minorisation qui ferait partie de l’expérience des groupes minoritaires et aiderait à comprendre leurs revendications et leur comportement politiques. Il vise aussi à développer cette théorie au contact de la réalité des francophones du Canada en situation minoritaire, qui se définissent eux-mêmes par cette situation plutôt que géographiquement (comme hors Québec). Nous procédons d’abord à partir d’une lecture croisée de l’oeuvre philosophique de Deleuze et Guattari et de celle de Tocqueville, afin de préciser le sens du concept de minorité en relation au pouvoir et hors de la référence à la démographie, puis d’esquisser les contours des sentiments de minorisation et d’égalité. Nous passons ensuite aux travaux contemporains en psychologie sociale portant sur les émotions collectives et les relations intergroupes pour valider et préciser davantage les résultats de cette lecture. Enfin, nous nous tournons vers l’événement du « jeudi noir » de l’Ontario français, quand le gouvernement provincial mit fin à deux institutions assurant les services aux Franco-Ontarien·ne·s, pour examiner la réaction de la population francophone à travers le prisme du sentiment de minorisation. Il ressort de cette étude et de cette catégorisation de sentiments politiques liés à la relation à la norme sociale qu’un sentiment de minorisation peut émerger dans un contexte où un groupe se sent égal ou supérieur aux autres et s’attend à pouvoir participer à la définition de la norme pour la société plus large.

Keywords