Annales du Patrimoine (Sep 2024)
Célébration et désacralisation du patrimoine culturel chez Chimamanda Ngozi Adichie et Fatou Diome
Abstract
La présente réflexion porte sur l’enracinement culturel et le regard critique que portent Chimamanda Ngozi Adichie et Fatou Diome sur leur propre patrimoine. Son objectif en est de démontrer comment la prose romanesque de ces écrivaines contemporaines oscille entre célébration du patrimoine culturel et désacralisation de certains aspects de la tradition jugés rétrogrades en cette ère de la mondialisation. En partant de l’approche thématique, l’article saisit la vision du monde des auteures à partir de la récurrence des thèmes qui concordent l’intérêt du groupe. La première partie dévoile l’enracinement culturel à travers la réappropriation des croyances, des rites, des langues et cultures du terroir. Par ailleurs, l’analyse a pris en compte le regard critique des romancières sur leur propre patrimoine culturel. La chute de l’autorité patriarcale et la critique des dogmes traditionnels participent de l’engagement des romancières contre leur tradition. Ainsi, l’assassinat du personnage masculin se présente comme une forme de libération et d’affirmation de la figure féminine. Par l’écriture de la chute du pouvoir masculin, Chimamanda sanctionne l’aliénation du fils du terroir et renforce la conservation des valeurs culturelles de la société igbo du Nigéria. Chez Fatou Diome, le personnage féminin ne tue pas mais se contente de déplorer le système traditionnel qui étouffe la liberté de la femme. Partant, les deux romans féministes passent de l’enracinement culturel à l’autocritique. En se penchant sur les réalités du Nigéria et celles du Sénégal, Adichie et Diome traduisent l’attachement de la diaspora africaine aux terres d’origine et s’inscrivent dans un féminisme en quête de l’autonomie de la femme.