Cahiers d’histoire. (Oct 2009)
La marchandisation du travail dans la société anglaise de la fin du xviie siècle au début du xixe siècle
Abstract
Si la marchandisation du travail sert généralement à décrire les rapports de production et d’échange rattachés au mode de production capitaliste dans la société anglaise du xixe siècle (Engels, 1844; Marx, 1867), il est nécessaire de remonter au xviie siècle pour y voir les prémisses de ce que l’on qualifie aujourd’hui de marché du travail. John Locke (1689-1696) pose les bases du libéralisme économique en définissant la propriété privée à partir du travail. Au cours du xviiie siècle, le travail (la force productive des bras) et le commerce constituent les rouages essentiels de la richesse d’une nation. Adam Smith (1776) vante les mérites de la division du travail et de la sphère des échanges. L’économie politique fait ses premiers pas et revendique déjà une démarche scientifique pour comprendre les faits sociaux. David Ricardo et Robert Malthus insistent sur les lois générales, nécessaires et naturelles de cette nouvelle science. La loi de l’offre et de la demande constitue une caractéristique essentielle du marché, elle s’applique à toutes les marchandises, y compris la monnaie, la terre et le travail. Les économistes vont ainsi constituer une grille d’analyse susceptible d’expliquer les causes et d’apporter des solutions aux problèmes de société. Dès lors, la pauvreté ne relève plus de la charité, de la morale ou de la philosophie politique. Elle repose sur une démarche scientifique. C’est sur cette base que David Ricardo et Robert Malthus engageront un véritable réquisitoire contre les lois sur les pauvres. Accusées de favoriser les mariages imprudents, de générer une explosion démographique et de déstabiliser les forces du marché, elles seront abrogées en 1834. Cette victoire des économistes libéraux ouvre ainsi la voie à l’avènement du système capitaliste et à la naissance d’un véritable marché du travail.
Keywords