Cahiers d’Études Romanes (Dec 2015)

Magna violence dans Abril rojoou comment dire l’indicible

  • Pierre Lopez

DOI
https://doi.org/10.4000/etudesromanes.5022
Journal volume & issue
Vol. 31
pp. 97 – 108

Abstract

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Dans le roman Abril rojo de Santiago Roncagliolo, vu par l’auteur comme la concrétisation de sa volonté d’écrire un thriller très sanglant, la violence est une constante. Il s’agit d’une violence directe, concrète, qui se « visualise » avec les fosses communes, avec les séquelles des affrontements armés entre le Sentier Lumineux et l’Armée ; mais c’est aussi une violence sourde, menaçante, qui imprègne tout le récit et qui lui donne un caractère indéfinissable. La violence étant difficile à appréhender, l’hybridité du texte proposé par Roncagliolo dans la juxtaposition de textes et de narrateurs différents, serait-elle alors une pratique permettant de nous rapprocher de l’indicible et de « normer » en quelque sorte le caractère indéfinissable de la violence ? Ainsi, dans ce thriller, plus que de rétablir l’ordre dans la résolution de l’enquête ou de mettre l’accent sur l’aspect événementiel, dans la série de meurtres et dans la macabre stratégie mise en place pour les exécuter, il s’agit de révéler le terreau historique, idéologique, mythique et socio-économique dans lequel s’épanouissent la violence et les questionnements qu’elle induit. De fait, le dépassement d’un système d’opposition manichéen du bien contre le mal s’impose pour privilégier la confrontation de l’Homme, et principalement de l’enquêteur, à cette violence. L’enquêteur Chacaltana est à la fois victime et « vecteur » de cette violence, pris dans un « entre deux » qui participe à la trame, voire même rivalise avec la résolution de l’enquête.

Keywords