SHS Web of Conferences (Jul 2012)

Être (d’accord) ou ne pas être (d’accord) ? L’enjeu du débat Aubry-Hollande : entre indépendance et unité

  • Richard Arnaud,
  • Sandré Marion

DOI
https://doi.org/10.1051/shsconf/20120100245
Journal volume & issue
Vol. 1
pp. 643 – 661

Abstract

Read online

Le débat de l’entre-deux tours des primaires socialistes, qui a opposé Martine Aubry et François Hollande le 12 octobre 2011, est inédit à la télévision française. Cette interaction présente des caractéristiques génériques particulières : s’il s’agit bien d’un échange relevant du genre débat politique télévisé – et plus précisément appartenant à la famille des « débats de l’entre-deux tours » –, il est aussi un débat interne à un parti politique visant à élire le candidat de cette formation pour les prochaines élections présidentielles françaises, en 2012. Ce débat doit être défini à partir de ces deux critères. Le fait que ce soit un face à face entre les deux candidats arrivés en tête des votes à l’issue du premier tour des élections renforce l’antagonisme du genre débat : les deux se battent l’un contre l’autre et doivent gagner l’adhésion des téléspectateurs-électeurs, i.e. leur vote le dimanche suivant pour arriver en tête du second tour. L’objectif est donc d’opposer les deux candidatures et pour Martine Aubry comme pour François Hollande de prouver qu’il est meilleur que l’autre et/ou que l’autre est moins bon. C’est aussi un débat interne à une formation politique : en ce sens, les deux candidats partagent les mêmes valeurs politiques, ont un projet commun (le projet voté par les socialistes) et s’opposent tous les deux à la candidature – non encore officielle – du candidat de la formation politique adverse. L’objectif d’une telle élection est donc de montrer, au-delà des divergences personnelles, une cohésion de parti et de partager les mêmes idées contre un adversaire externe au débat. On peut donc caractériser cette interaction par la nécessité à la fois de montrer le dissensus entre les deux candidats – et proposer ainsi un vrai débat – et de construire un consensus plus global – afin de donner une image unie du parti socialiste. Le rôle des animateurs d’ailleurs est bien celui de l’arbitre entre ces deux tensions : ils interviennent fréquemment pour préciser les points de divergence et les points de convergence entre les deux candidats. Cet article se propose d’analyser ces deux pendants inhérents à ce nouveau sous-genre qu’est le face-à-face interne à une formation politique, et de montrer comment les deux candidats se positionnent l’un par rapport à l’autre. En nous inscrivant délibérément dans le champ de l’analyse du discours, nous utiliserons les outils de l’analyse interactionnelle afin de proposer une étude plurimodale, s’attachant aux différents éléments discursifs, conversationnels ou encore non verbaux témoignant l’accord ou le désaccord.