AMJAU, African and Mediterranean Journal of Architecture and Urbanism (Feb 2019)
LES BIDONVILLES AU MAROC : ENTRE RÉSORPTION ET RÉSISTANCE
Abstract
Présent depuis plus d’un siècle, le bidonville au Maroc, en tant que mode d’habitat sommaire et anarchique, a développé une certaine résistance aux multiples tentatives de résorption engagées tant par les autorités coloniales que par les pouvoirs publics marocains. Ainsi, malgré tous les efforts déployés pour éradiquer ce mode d’habitat, considéré par certains comme « un parasite et un cancer », le phénomène bidonville séduit encore et s’amplifie davantage, surtout au niveau des grandes villes du Royaume. Une résistance qui ne nous laisse pas indifférents. Elle nous interpelle, en tant que chercheur, sur la pertinence des politiques de résorption engagées ; sur les stratégies habitantes mises en oeuvre pour décrédibiliser les actions publiques ; sur les enjeux affichés et ceux en filigranes en arrière plan des modes de résorption préconisés et sur les effets des transferts forcés des bidonvillois loin de leurs lieux de travail et de sociabilité. A cet égard, plusieurs questionnements s’imposent : la résistance du bidonville n’est elle pas une réaction naturelle de l’échec des politiques publiques en matière de résorption ? La résistance, n’est-elle pas une affirmation d’un mode d’habitat qui correspond à un mode de vie ? La résistance, n’est-elle pas une occasion de réinventer une nouvelle boite à outils qui puise ses fondements tant dans le ‘technique’ que dans le social et l’économique ? La résistance, n’est-elle pas une forme parmi d’autres de résilience de ce mode d’habitat face à des stratégies devenues obsolètes et sans grands effets ? Le recyclage de cette forme d’habitat n’est-elle pas une alternative aux actions de nettoyage social et spatial initiées par l’Etat ? Autant de questions qui motivent cette réflexion sur les bidonvilles au Maroc dont le débat reste encore d’actualité.